Le rôle de l’avocat de la partie civile devant la cour d’assises

Vous êtes partie civile dans une affaire criminelle ? Prenez conseil auprès d’un avocat.

I. La constitution de partie civile

A. Personnes pouvant se constituer partie civile

Afin de se constituer partie civile devant la Cour d’assises dans une affaire criminelle, la personne victime doit avoir un intérêt, la qualité et la capacité à agir.

L’article 2 du Code de procédure pénale dispose :
« L’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. »

1. Intérêt à agir

La personne physique doit avoir subi un préjudice certain, personnel et direct.

Le caractère certain du préjudice s’oppose au préjudice éventuel, qui ne s’est pas encore réalisé et dont la survenance est incertaine.

Le préjudice doit être personnel, ce qui inclut les victimes directes et les victimes par ricochet.

Le préjudice doit également être direct, c’est-à-dire en lien avec l’infraction.

2. Qualité à agir

La victime directe de l’infraction a qualité à agir. Tel est également de la victime par ricochet et des héritiers de la victime décédée.

3. Capacité à agir

Les mineurs sont représentés par leurs parents titulaires de l’autorité parentale. L’article 706-55 du Code de procédure pénale prévoit la possibilité de désigner un mandataire ad-hoc, lorsque les parents ne sont pas en mesure de représenter leur enfant.

Le tuteur du majeur sous tutelle peut se constituer partie civile pour ce dernier. Les majeurs sou sauvegarde de justice ou sous curatelle conservent la capacité de se constituer partie civile.

B. Moment de la constitution de partie civile

La Cour d’assises est compétente pour connaître des crimes, c’est-à-dire des infractions pour lesquelles leur auteur encourt une peine supérieure à 10 ans de réclusion criminelle (article 131-1 du Code pénal).

En matière criminelle, l’instruction est obligatoire (article 79 du Code de procédure pénale).

1. La constitution de partie civile pendant l’instruction

Le juge d’instruction au titre de l’article 80-3 du Code de procédure pénale, doit avertir la victime, dès le début de l’information, de son droit de se constituer partie civile. Si la victime est mineure, l’avis est adressé à ses représentants légaux.

L’avis indique que la victime, si elle le souhaite, peut se constituer partie civile, être assistée d’un avocat qu’elle aura choisi ou qui sera à sa demande désigné d’office, précisant que les frais seront à sa charge, sauf si elle bénéficie de l’aide juridictionnelle ou d’une assurance de protection juridique.

La victime, si elle souhaite se constituer partie civile et si elle a déjà désigné un avocat, peut faire déposer par son Conseil au greffe de l’instruction une constitution de partie civile. Lorsqu’un avocat est désigné, la victime doit l’indiquer dans son courrier.

Au courrier de constitution de partie civile est joint une déclaration d’adresse. La partie civile peut effet faire le choix d’élire domicile chez son avocat le temps de la procédure. C’est son avocat qui recevra tous les courriers du juge d’instruction, à charge pour lui ensuite de les communiquer à son client.

2. La constitution de partie civile à l’audience

L’action civile ne peut être portée devant la cour d’assises saisie de l’action publique que jusqu’à la clôture des débats, prévue par l’article 347 du Code de procédure pénale (Crim. 21 déc. 1966, n°66-92.873).

La constitution de partie civile à l’audience ne requiert aucune forme particulière. Elle peut être introduite par la partie civile elle-même ou par son avocat.

Si la constitution n’est pas contestée par les parties, le Président ou la Cour peuvent donner acte de la constitution de partie civile. 

La constitution de partie civile peut également être constatée dans le procès-verbal des débats, sans qu’il n’en soit donné acte par le Président ou la Cour. 

Si la constitution de partie civile présentée à l’audience est contestée par les parties, la Cour doit alors statuer sur la constitution par un arrêt motivé, après que les parties aient été entendues en leurs observations (article 316 du Code de procédure pénale).

La constitution de partie civile formée pour la première dans un procès en appel n’est pas recevable (la partie civile doit s’être constituée dès le premier procès).

II. L’exercice des droits de la partie civile par son avocat

Lorsque la partie civile est représentée par un avocat, ses droits seront exercés par ce dernier.

1. Avant l’audience devant la Cour d’assises

Avant le début du procès, la partie civile peut, si elle le souhaite, faire citer des témoins (article 281 du Code de procédure pénale). Les témoins ne peuvent toutefois déposer que sur les faits reprochés à l’accusé, sur sa personnalité et sur sa moralité (article 331 du Code de procédure pénale).

2. Pendant l’audience devant la Cour d’assises

Si la partie civile est représentée par un avocat, elle n’a nullement l’obligation d’être présente à l’audience.

Les victimes de viol peuvent demander que les débats soient tenus à huis clos (article 306 du Code de procédure pénale).

Au cours des débats, l’avocat de la partie civile dispose de la faculté de poser directement des questions à l’accusé, aux témoins et à toute personne entendue à la barre : experts… (articles 312 et 332 du Code de procédure pénale).

La partie civile peut demander à ce que soient actées au procès-verbal des débats toutes les variations et tous les changements dans les déclarations des témoins (article 333 du Code de procédure pénale).

La partie civile ne peut être entendue sous serment pendant les débats (article 335 du Code de procédure pénale). Cela n’exclut pas qu’elle soit appelée à la barre, pour déposer sans avoir prêté serment (Crim., 7 mai 1996). A la fin de la déposition de la partie civile, son avocat peut l’interroger.

En pratique, lorsque la partie civile est une victime par ricochet, suite au décès de la victime directe par exemple, son avocat peut lui demander d’évoquer la personnalité et la vie de la victime avant les faits. Il peut également l’interroger sur ses attentes face au procès.

La partie civile, par le biais de son avocat, peut demander qu’un témoin qui a achevé de sa déposition sorte momentanément de la salle (article 338 du Code de procédure pénale), qu’un témoin suspecté de faux témoignage soit retenu jusqu’à la clôture des débats (article 342 du Code de procédure pénale).

L’avocat de la partie civile possède également la faculté de demander le renvoi de l’affaire à une session ultérieure (article 343 du Code de procédure pénale).

Une fois l’instruction à l’audience terminée, la partie civile ou son avocat est entendu en sa plaidoirie.

En fonction des avocats, la plaidoirie peut par exemple porter sur les souffrances endurées par la partie civile ou les incohérences dans les déclarations de l’accusé.

3. Pendant l’audience sur les intérêts civils

La partie civile peut être indemnisée de son préjudice moral, de son préjudice corporel, mais aussi de son préjudice économique (perte de revenus, …).

L’article 3 du Code de procédure pénale dispose :
« L’action civile peut être exercée en même temps que l’action publique et devant la même juridiction. Elle sera recevable pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découleront des faits objets de la poursuite. »

En cas d’insolvabilité du condamné, la partie civile pourra obtenir le versement des indemnités par la CIVI (Commission d’indemnisation des infractions).

L’article 371 du Code de procédure pénale dispose :
« Après que la cour d’assises s’est prononcée sur l’action publique, la cour, sans l’assistance du jury, statue sur les demandes en dommages-intérêts formées soit par la partie civile contre l’accusé, soit par l’accusé acquitté contre la partie civile, après que les parties et le ministre public ont été entendus.
La cour peut commettre l’un de ses membres pour entendre les parties, prendre connaissance des pièces et faire son rapport à l’audience, où les parties peuvent encore présenter leurs observations et où le ministère public est ensuite entendu.
 »

Après le prononcé du verdict, les jurés se retirent. Si l’accusé a été déclaré coupable, une audience sur les intérêts civils à lieu. Il s’agit de déterminer le montant de l’indemnisation du préjudice subi par la partie civile.

A cette fin, l’avocat de la partie civile communique à la Cour, à l’Avocat général et à la Défense ses conclusions écrites, détaillant les différents préjudices subis par la partie civile, sur le fondement de la nomenclature Dintilhac. L’avocat peut présenter à l’appui de sa demande des pièces justificatives.

L’avocat de la partie civile présente ensuite ses demandes chiffrées. La Cour d’assises ne peut aller au-delà de ces demandes mais elle peut en réduire le montant.

La décision peut être rendue après que la Cour en ait rapidement délibéré. La Cour peut également mettre sa décision en délibéré ou renvoyer la décision à une audience ultérieure, devant le tribunal de grande instance du ressort des assises (article 371-1 du Code de procédure pénale).

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